dimanche 6 janvier 2008

Gaz naturel : Mario Dumont a trahi ses membres

La version originale de cet article a été publié sur Un Homme En Colère le 4 janvier 2008.

Lors du soulèvement contre le projet du Suroît, Mario Dumont et l’ADQ avaient appuyé la population en demandant au premier ministre Jean Charest d’abandonner la construction d’une centrale alimentée au gaz naturel. Le point de presse de Dumont à l’Assemblée Nationale du 19 janvier 2004 était sans équivoque : ce projet était contraire aux objectifs de Kyoto et représentait un mauvais investissement sur les plans énergétique et scientifique (1).

Dans son programme électoral, l’ADQ s’engage à promouvoir le développement des énergies « propres » comme l’hydroélectricité, l’énergie éolienne, la géothermie et l’énergie solaire. La formation politique promet également de s’engager dans la lutte aux changements climatiques et d’atteindre les cibles du protocole de Kyoto (2).

Mais voilà que les ambitions écologiques de Mario Dumont entrent en collision avec la mission fondamentale de son parti : le développement économique. Quelques jours avant Noël, le chef de l’opposition a donc décidé d’appuyer les libéraux en donnant son accord au projet de loi 204 qui donne le feu vert à la construction du port méthanier Rabaska. Trois semaines plus tôt, le chef de l’opposition avait participé à une rencontre entre le premier ministre Stephen Harper, la chambre de commerce de Rivière-du-Loup et les promoteurs du projet de Gros-Cacouna (3).

Non seulement ces appuis aux deux ports méthaniers semblent être en contradiction avec le programme de son parti et ses positions antérieures sur l’environnement, mais Mario Dumont ne semble pas être préoccupé par la sécurité de ses électeurs. En effet, le gouvernement du Canada s’est encore opposé à un projet similaire en refusant un droit de passage maritime essentiel à un futur port méthanier aux Etats-Unis. Le premier ministre Harper refuserait d’obtempérer à une demande officielle qui exige que le Canada permette à des navires de baigner en eaux canadiennes afin d’atteindre un port méthanier qui serait construit dans l’État du Maine. Selon le gouvernement canadien, « il serait beaucoup trop dangereux de permettre aux pétroliers d'emprunter ce passage, l'un des moins sûrs au Canada… ». Le député néo-brunswickois Greg Thompson a par ailleurs mentionné que « les risques qu'un déversement survienne étaient tout simplement trop élevés pour permettre aux pétroliers d'y passer. » (4)

Les bateaux devront donc naviguer dans le détroit de Head Harbour afin d’atteindre le port méthanier de Pleasant Point (5). Ce plan d’eau, considéré par le gouvernement canadien comme étant problèmatique à la navigation, ne semble effectivement pas beaucoup plus large que le fleuve St-Laurent en face de l’Ile d’Orléans… Est-ce que les gouvernements canadiens et québécois ont utilisé les mêmes normes pour calculer le niveau de danger pour la navigation maritime ici même au pays?

La demande en gaz naturel connaît une hausse importante aux Etats-Unis. Les américains se voient donc obligés de se tourner vers l’importation de gaz naturel liquide (LNG) mais l’opposition du public aux ports méthaniers et les nouvelles restrictions associés à la protection du territoire, rendent la vie difficile aux promoteurs. Comme c’est l’usage avec les paquebots, nos voisins du sud obligent les pétroliers à être escortés par des navires militaires afin d’accéder au port méthanier. Ces navires ont l’autorisation d’intercepter une embarcation qui se retrouve trop près du pétrolier et si elle représente une menace à la sécurité territoriale. La construction de ces installations à l’extérieur des zones densément peuplées ou (idéalement) en territoire canadien, représente actuellement la solution privilégiée par les autorités américaines. La construction d’un port méthanier est déjà lancée à St-Jean (N.-B.) et d’autres sites sont considérés en Nouvelle-Écosse et au New-Jersey (6).

Toutefois, le promoteur du port méthanier de Pleasant Point a demandé au gouvernement américain de fermer le gazoduc canado-américain si le Canada refuse l’accès des pétroliers vers leurs installations. En se basant sur les règles de la liberté d’entreprise et de la saine concurrence, la compagnie Quoddy Bay demande donc au président Bush de convaincre son homologue canadien de favoriser l’économie au détriment de la sécurité (7).

Seuls les partis d’opposition auraient pu faire entendre les voix des citoyens qui contestent le projet Rabaska. Si j’avais voté pour l’ADQ et Mario Dumont, je serais fort déçu de la tournure des évènements. Même dans l’optique où l’on est d’accord avec ce mode d’approvisionnement énergétique, on peut au moins questionner le choix du site.

Garde côtière américaine escortant un cargo de gaz naturel (LNG tanker) dans le port de Boston

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(1) Point de presse de Mario Dumont, Assemblée Nationale du Québec, le 19 janvier 2004.

(2) Programme de l’ADQ 2007 – Environnement : construire l’avenir en vert.

(3) Gaz naturel: Harper aurait refusé une demande de Bush.

(4) De grosses affaires à Rivière-du-Loup?

(5) Carte : http://www.epodunk.com/cgi-bin/genInfo.php?locIndex=2297

(6) Canaport LNG fournira 20% de la demande en gaz naturel dans les états de la Nouvelle-Angleterre

(7) Quoddy Bay Delivers Letter to Secretary of State.

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